Le 11 mai 2020

En réaction à l’intervention du Président de la République et du ministre de la culture,
au-delà des annonces : nous attendons à présent des actes
« afin de préserver la diversité culturelle française » !


Mercredi 6 mai, le Président de la République, en présence des ministres de la culture, de l’économie et du travail, ainsi que de 13 artistes associés en visio-conférence, prenait la parole pour dévoiler une série de mesures en faveur du monde de la culture. Nous ne commenterons pas la méthode qui a prévalu à cette allocution, l’essentiel étant pour nous de redonner à la culture une attention à la mesure de ses missions et de la crise qui impacte jusqu’à la survivance de ses modèles.   Nous, entreprises adhérentes au SMA, indépendantes et revendiquant une lucrativité limitée, toutes investies dans le secteur des musiques actuelles que ce soit en faveur de la création, de la formation et de la diffusion des œuvres, tenons à saluer la décision de prolonger les droits des intermittents du spectacle jusqu’à fin août 2021.

Nous exerçons en effet notre activité dans un secteur dans lequel les artistes sont au cœur même de la création : cette mesure était donc indispensable pour penser notre écosystème dans la pérennité. N’oublions pas non plus que nos activités impliquent également d’autres contrats courts et précaires ainsi que de nombreux indépendants ou prestataires, tels que les artistes-auteurs, les managers, les attachés de presse, les photographes, la presse spécialisée, les éditeurs, les prestataires techniques, l’hôtellerie et la restauration, les entreprises de sécurité, etc. Ils doivent eux aussi être pris en compte.   Nous nous réjouissons en outre de la dotation du tout récent Centre National de la Musique (CNM) de 50 millions d’euros. Cela nous permettra non seulement de lancer les missions qui lui incombent en vue de structurer la filière de la musique en France et que nous avions été contraints de mettre en suspens, mais aussi d’apporter un soutien d’envergure aux entreprises qui relèvent de son périmètre : spectacle vivant comme musiques enregistrées.   Nous prenons encore bonne note de la création d’un fonds en faveur des festivals et plus largement des associations et entreprises culturelles, à travers un accompagnement « en capital et en activité ».

En effet, ce fonds est indispensable pour que l’avenir de ces projets ne soit pas hypothéqué à cause de la crise que nous traversons, pour que «  les indépendants puissent rester indépendants », puisque, tel que l’a rappelé le Président de la République « ce monde a besoin de son indépendance pour garantir sa diversité ».
Nous sommes particulièrement inquiets de l’avenir de ces projets à moyen terme, dans un environnement mondialisé et hyper concurrentiel.

Nous nous inscrivons de surcroît dans la lignée d’une réouverture progressive des lieux de diffusion proposée par le Président : d’abord avec la reprise des créations et des résidences ces prochaines semaines puis, quand il en sera temps, de la diffusion. Nous attirons aussi l’attention sur l’importance des locaux de répétions ouverts tant aux professionnels qu’aux amateurs qui font partie intégrante du projet de nombreux établissements. Ceci posé, vu les esthétiques que nous diffusons, très majoritairement en configuration « debout », nous ne pouvons envisager de reprendre aujourd’hui notre activité de diffusion de spectacles dans des conditions imposées par les normes sanitaires indiquées et que nous comprenons, mais qui vont à l’encontre de la convivialité et de la proximité qu’implique la diffusion des musiques et que nous revendiquons. Cela questionne autant le sens de nos projets que leur économie, mixte et reposant tout autant sur les ressources issues de la billetterie, du bar et de la restauration que sur des subventions publiques liées à des projets artistiques et culturels qui, nous le savons, ne pourrons répondre en l’état aux normes qui nous seront imposées. Nous saluons à cet égard l’engagement du gouvernement à continuer à soutenir les entreprises, notamment via le dispositif d’activité partielle, tant que notre activité restera à l’arrêt : c’est ce qui garantira notre survie. Aussi, au cours de cette période de transition, nous comptons sur un soutien significatif de l’Etat et des collectivités territoriales pour accompagner les initiatives prises par nos adhérents qui viseront à réinventer temporairement leurs projets dans le but de maintenir une activité culturelle et du lien social.

Toutefois, gageons que ces annonces encourageantes pour le secteur culturel et particulièrement pour celui des musiques actuelles seront cette fois rapidement suivies d’effets car sans textes réglementaires, sans directives claires auprès des administrations dont la tâche est complexe dans ce contexte inédit, tout ceci n’est que de la communication.

Par exemple, depuis les allocutions du Président de la République du 13 avril et du Premier Ministre le 28 avril interdisant les festivals de plus de 5000 personnes d’abord jusque mi-juillet puis jusqu’à fin août, toujours aucun texte n’est venu préciser le cadre réglementaire de ces annonces. Il est donc concrètement toujours impossible pour les organisateurs d’annuler leurs événements sans engager leur propre responsabilité contractuelle et morale pour une décision sanitaire et légale qui leur échappe totalement. Dans cette lignée, nous serons donc particulièrement attentifs à la mise en œuvre effective et imminente du report des droits des intermittents annoncé. A cet égard, nous tenons d’ailleurs à rappeler que la participation aux projets d’éducation artistique n’ouvre qu’un droit limité à la comptabilisation d’heures dans le cadre de l’intermittence.

Quant au recours à l’activité partielle, les associations comme les établissements publics à qui ce recours a d’abord été autorisé se retrouvent aujourd’hui dans le doute, en raison de la publication récente de dispositions contradictoires et peu claires sur ce sujet d’extrême importance, et sur lesquelles nous peinons à obtenir des réponses malgré nos demandes réitérées…
Au-delà des mesures annoncées, c’est un choc de simplification que nous revendiquons : les entreprises ont besoin de pouvoir reprendre leur activité avec le moins de contraintes et le plus de visibilité possibles.

Nous appelons le gouvernement à y travailler en concertation avec nous, professionnels, pour définir un cadre d’exercice adapté, mais aussi en lien avec les collectivités qui demeurent très impliquées dans la vie culturelle.

Ainsi, nous avons par exemple proposé une adaptation des mesures fiscales dédiées au secteur culturel (crédit d’impôt, mécénat, taux de TVA du disque). Nous souhaitons que celles-ci puissent être aussi rapidement étudiées pour concourir à la relance du secteur culturel.

Nombreux sont celles et ceux qui appellent de leur vœux une nouvelle donne pour la culture, remettant au centre le contrat social fondamental entre les artistes, les publics, les acteurs et la Nation.

Il appartient au politique d’offrir un écrin aux concertations nécessaires et de trouver les moyens de soutenir les aspirations de nos concitoyens.

 

La Lettre ouverte des organisateurs de festivals au Gouvernement

Pour une Nouvelle Donne en faveur des musiques actuelles

 

Contact presse : Aurélie Hannedouche – Déléguée générale du SMA – dg@sma-syndicat.org – 06 99 10 75 75