Paris, le 20 octobre 2020

Couvre-feu : la culture mise « sous cloche »

Le 27 août dernier, le Premier Ministre et la Ministre de la Culture réunissaient les représentant·e·s des professionnel·le·s du spectacle rue de Valois pour affirmer publiquement que le plan de relance prendrait en compte les spécificités et les enjeux portés par le secteur culturel, ainsi que pour annoncer la création d’un mécanisme de compensation des pertes de billetterie en nous incitant ainsi à reprendre le travail.
Ce fonds, doté de 100 millions d’euros pour les mois de septembre à décembre 2020, se voulait « à la hauteur de l’importance économique et sociale du spectacle vivant en France ».

Convaincus, comme le Premier Ministre, qu’au-delà de leur poids économique, les pratiques culturelles jouent un rôle social de première importance, encore plus particulièrement dans le contexte extrêmement délétère et anxiogène que nous traversons, les adhérents du SMA, salles de concerts, festivals et producteur·trice·s de spectacles, ont décidé de s’emparer de la mesure pour proposer à nouveau des concerts dès le mois de septembre.
L’exercice n’était pourtant pas aisé pour des structures déjà largement fragilisées sur le plan économique autant que dans la relation qu’elles entretiennent avec des populations dont les habitudes ont été fortement impactées par la crise sanitaire et les mesures qui ont entouré son évolution.
En effet, l’article 45 du décret du 10 juillet 2020 impose que les spectacles soient toujours proposés en configuration assise, ce qui induit des changements de programmations et de coûteux aménagements, mais aussi une modification de l’expérience pour les spectateur·trice·s afin d’adapter des lieux configurés pour jouer « debout ».
Ensuite, la réduction drastique des jauges pèse fortement sur les modèles économiques des structures, et le mécanisme ne compense hélas pas l’ensemble des pertes, telles que celles liées à la restauration et au bar, ou encore aux locations de salle.
Ceci étant, malgré la lourdeur et le coût de ces nouvelles normes, les acteur·trice·s des musiques actuelles se sont saisi·e·s de cette mesure compensatoire comme d’une opportunité, en décidant à l’unanimité de rouvrir les lieux aux artistes et aux spectateur·trice·s, réaffirmant ainsi que leur mission relève de l’intérêt général.

Les premiers concerts qui se sont déroulés dans ces configurations ont rencontré beaucoup de succès : les artistes sont ravi·e·s de pouvoir enfin retrouver le chemin de la scène, tandis que le public est au rendez-vous, heureux de ces émotions et ces temps de partage retrouvés.

Aussi, c’est avec stupeur, colère et incompréhension que nous avons reçu les annonces du Président de la République inhérentes à la mise en place d’un couvre-feu dès 21H en Île-de- France et dans huit métropoles, pour le moment.
Comment seulement un mois et demi après les annonces du Gouvernement de ne pas nous laisser « sous cloche » mais de nous inciter à reprendre le travail et de jouer notre rôle dans la société, une telle mesure a-t-elle pu être édictée ?
L’injonction est pour le moins paradoxale !
Pourtant, face à cette crise sanitaire, notre responsabilité n’a pas été mise en défaut, et les lieux de musiques actuelles se conforment à des protocoles stricts d’accueil du public qui ont fait leurs preuves et garanti des conditions sanitaires optimales.
D’ailleurs, comme nous l’a redit récemment Madame la Ministre de la Culture lors des États Généraux des festivals à Avignon, « aucune salle de spectacles à ce jour n’a été à l’origine d’un foyer épidémique ».

Nous souhaitons donc dénoncer encore une fois et avec vigueur le manque de cohérence et de concertation dans les mesures prises par ce Gouvernement.
Cette attitude pose également, et de manière crue dans ce contexte incertain et anxiogène, la question de la place qu’il souhaite donner à la Culture dans notre société. Car la Culture, par ses valeurs, par sa vocation à créer du lien et de la convivialité, par sa capacité à interroger, contribue positivement aux questions de santé publique et ne saurait y être opposée.

Pour terminer, nous appelons à parvenir à des solutions rapides afin de pouvoir continuer de proposer des spectacles et notamment des concerts en début de soirée, tel qu’a tenté de le défendre en fin de semaine dernière la Ministre de la Culture, que nous souhaitons chaleureusement remercier ici pour sa compréhension de la situation et sa détermination.

N’abandonnez pas le secteur culturel et nos entreprises,
Ne nous interdisez pas d’aller mieux en empêchant les spectacles !

Contact presse :
Aurélie Hannedouche – dg@sma-syndicat.org – 06 99 10 75 75