28 septembre 2022

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Les organisations de la musique interpellent le gouvernement :
« FINANCEMENT DE LA CRÉATION MUSICALE : QUE SACRIFIE-T-ON ? »

À compter du 1er janvier 2023, les ressources dont disposera le Centre National de la Musique (CNM) ne lui permettront plus d’assurer les missions qui lui ont été confiées par la loi, au risque de déstabiliser l’ensemble de la filière musicale et des variétés. Les organisations professionnelles et organismes de gestion collective représentant la musique enregistrée et le spectacle ont interpellé les pouvoirs publics et proposé une solution de financement pérenne, sans obtenir de réponse claire. Comment, trois ans à peine après la création de la « maison commune » de la musique, le gouvernement peut-il ainsi abandonner la filière musicale ? Quelle est sa vision pour le secteur ? Telles sont les questions que posent aujourd’hui le PRODISS, l’UPFI, la SPPF, le SMA, la FÉLIN, le PROFEDIM et le CALMULC.

La création, le 1er janvier 2020, au terme de nombreuses années de concertation et à la suite de nombreux rapports, du Centre national de la musique est venue combler une forte attente des professionnels de la filière : disposer d’un opérateur capable de coordonner et promouvoir la mise en œuvre d’une politique publique ambitieuse et efficace en faveur de la création musicale française.

Études de marché et observation du secteur, aides directes à la création, promotion des talents à l’export, formation professionnelle, actions de sensibilisation (égalité femmes-hommes, développement durable), appui aux démarches d’innovation… telles sont certaines des missions confiées à ce jeune établissement public, « sorti de terre » durant le premier mandat d’Emmanuel Macron.

Pendant la période de la Covid-19, le CNM, avec l’appui de l’État, a apporté un soutien décisif au spectacle vivant musical, qui était alors confronté à un effondrement de ses revenus, mais également aux autres composantes de la filière, dont il a encouragé la politique d’investissement et d’emploi.

Un financement pérenne non garanti

Alors que la situation économique du secteur en sortie de crise sanitaire est confrontée à de nouveaux chocs, la pérennisation du CNM se pose de manière urgente. Or sur ce sujet le projet de loi de finances pour 2023 observe un silence assourdissant.


COMMENT LE CNM EST-IL FINANCÉ AUJOURD’HUI ?
Le financement de l’établissement repose actuellement sur 3 ressources :

        • Une taxe sur la billetterie des spectacles musicaux et de variétés, dont le produit (35 M€ avant l’irruption du Covid-19) s’est effondré durant la période 2020-2021, et dont le retour à la normale reste encore incertain compte tenu de difficultés encore importantes (hausse des coûts, baisse de fréquentation).
        • Un financement garanti par l’État à hauteur de 26 M€, qui couvre à la fois les frais de fonctionnement de l’établissement, d’autres missions prévues par la loi et des fonds d’intervention.
        • Une contribution des organismes de gestion collective, initialement évaluée à 7 M€ mais qui, du fait à la fois des conséquences de la crise sanitaire et de la jurisprudence européenne du 8 septembre 2020 (arrêt RAAP), a été ramenée à 1,5 M€.

L’absence de contribution financière significative de la musique enregistrée entraîne deux conséquences :

  • Il n’existe, à l’exception des différents crédits d’impôt, aucun autre dispositif pérenne destiné à soutenir les autres composantes de la filière musicale (en particulier la production phonographique), dont l’activité est essentielle à la découverte, au développement, à l’accompagnement et à l’exposition des nombreux talents locaux ;
  • Le spectacle vivant contribue pour une très large part au financement abondant le CNM, une asymétrie qui ne saurait satisfaire la filière et menace en outre la mise en œuvre des aides transversales appelées de ses vœux par le gouvernement.

Le CNM doit-il rogner sur ses missions essentielles ?

Face à cette équation se pose la question du maintien des missions du CNM : QUE SACRIFIE-T-ON ?

  • L’observation de la filière, #ONSACRIFIE ?
    En l’absence de financement, la production d’études et de baromètres portant sur l’économie et les enjeux de la filière, de même que les classements de ventes, resteront entre les mains des organisations professionnelles et ne déboucheront sur aucune vue d’ensemble. Elles ne permettront pas non plus d’évaluer et de consolider les crédits d’impôts musique (spectacle vivant, production phonographique et édition musicale). Des tâches qui, dans le secteur du cinéma-audiovisuel, sont naturellement dévolues au CNC.
  • La diversité musicale, #ONSACRIFIE ?
    Les aides publiques à la création sont un élément fort de la structuration d’un secteur : elles permettent de renforcer le tissu local de TPE-PME, de favoriser l’investissement et l’emploi et d’encourager la prise de risque artistique. À défaut d’un soutien direct, les acteurs économiques reporteront fatalement leurs priorités sur des projets moins risqués et plus facilement rémunérateurs, et délaisseront les projets les plus fragiles, au risque de la disparition progressive de certaines esthétiques (classique, jazz, chanson française, musiques du monde, musiques de patrimoine et de création, etc.) et d’une uniformisation de la production dans sa globalité. Un désastre pour la création de valeur, que vient accentuer l’incertitude pesant sur la prorogation des crédits d’impôt musique, qui offrent pourtant visibilité et sécurité à la création émergente.
  • La souveraineté culturelle, #ONSACRIFIE ?
    À l’heure où se multiplient les rachats de catalogues par de grands acteurs internationaux, le soutien à la diversité permet à la création française de conserver ses actifs et de promouvoir sa singularité sur un marché de plus en plus mondialisé. Il peut également favoriser l’émergence de champions français et européens des industries culturelles, capables de concourir à notre souveraineté culturelle et à notre renouveau industriel.
  • L’exportation de nos productions, #ONSACRIFIE ?
    Le soutien au développement international risque de connaître une brutale décélération, alors même que les certifications de ventes à l’export attestent de performances toujours plus solides de la part de nos artistes sur d’autres marchés.
  • L’innovation dans le secteur musical, #ONSACRIFIE ?
    Alors que les multinationales et les plateformes transforment le secteur et s’emparent des nouvelles promesses technologiques (metaverse, web3, NFT, etc.), les acteurs économiques français risquent d’accuser un sérieux retard dans leur transformation numérique et dans l’anticipation des défis de demain.
  • La transition écologique, #ONSACRIFIE ?
    En l’absence de conseils et de soutien financier, les acteurs de la filière musicale seront démunis face aux exigences toujours plus grandes et urgentes de la transition écologique. L’évaluation de l’empreinte carbone est un dispositif souvent inaccessible aux TPE-PME et l’identification des leviers de progression induit des changements organisationnels profonds, que les entreprises risquent de délaisser.
  • La promotion de l’égalité femmes-hommes, #ONSACRIFIE ?
    La lutte contre les discriminations et les violences sexistes et sexuelles est également affaire de moyens : les dispositifs administrés par le CNM à la demande du gouvernement nécessitent des ressources qui risquent de faire défaut, alors même que la parole se libère.

Pour achever la construction du CNM, une solution consensuelle

Nous plaidons en faveur de l’instauration d’une contribution de l’écosystème de la diffusion numérique au financement de la diversité musicale. Celle-ci serait assise sur l’ensemble des revenus issus des abonnements payants aux formules de streaming musical et des revenus publicitaires ou de parrainage générés par l’exploitation des contenus musicaux (phonogrammes et vidéomusiques) sur l’ensemble des réseaux en ligne. Une contribution très faible, de l’ordre de 1,5%, pourrait suffire à compléter le schéma de financement du CNM sans perturber les modèles économiques.

Un projet finalement peu éloigné de ce qui existe déjà pour le cinéma, où les plateformes financent désormais la production d’œuvres européennes nouvelles, apportant leur pierre à la vitalité de la création locale.

Les contrats unissant plateformes et ayants droit prévoyant en outre la répercussion de toute taxe éventuelle sur les redevances versées à ces derniers, il est peu vraisemblable que les tarifs des abonnements augmentent du fait de cette contribution nouvelle.

Nous demandons donc au gouvernement d’instruire, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, ce projet de contribution afin de doter dès à présent le CNM de moyens pérennes, sans incidence pour le contribuable et le consommateur, mais bénéfique pour la création et les publics.

 

CONTACT MÉDIA : Julie ZEMMOUCHE – jzemmouche@bonafide.paris – 07 69 53 77 75

 


À propos du PRODISSCréé en France en 1984, le PRODISS, syndicat national du spectacle musical et de variété est aujourd’hui le 1er syndicat patronal représentatif au niveau national. Le PRODISS rassemble près de 400 entrepreneurs de spectacles : producteurs, diffuseurs, exploitants de salles, organisateurs de festivals, répartis dans toute la France et œuvrant dans le domaine des variétés, des musiques actuelles (jazz, musiques populaires, comédies musicales, etc.) et des one man shows. Ils forment ensemble, la chaîne de création et de diffusion d’un spectacle. Essentiellement des PME et TPE, nos adhérents génèrent près de 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires, soit plus des 3/4 du chiffre d’affaires de l’ensemble du secteur du spectacle musical et de variété.

À propos de l’UPFICréé en 1993, l’UPFI (Union des producteurs phonographiques français indépendants) est le syndicat historique des producteurs et distributeurs indépendants. Depuis près de 30 ans, il défend les intérêts des TPE, PME et ETI françaises dans leurs relations avec la filière musicale, avec les pouvoirs publics et avec la presse. Premier promoteur de la diversité musicale, l’UPFI s’engage pour faire rayonner la création française et pour favoriser son financement. Premier syndicat de producteurs phonographiques de la branche Édition en nombre d’entreprises, il rassemble près d’une centaine de membres dont Because, Believe, Entreprise, Harmonia Mundi, Idol, InFiné, Jo&Co, microqlima, My Major Company, Naïve, No Format, Outhere, Panenka Music, Pias, PlayTwo, Tôt ou tard, Wagram Music, Yotanka…

À propos de la SPPF Créée en 1986, la SPPF (Société Civile des Producteurs de Phonogrammes en France) regroupe les producteurs indépendants de musique enregistrée les plus importants et les plus actifs. Elle assure la répartition de près de 80% des droits voisins de l’ensemble des producteurs indépendants.

À propos du SMA Créé en 2005, le Syndicat des Musiques Actuelles (SMA) est le syndicat de la filière des musiques actuelles, aujourd’hui composé de près de 600 entreprises. Il représente ainsi des festivals, des salles de concerts (dont les salles labellisées SMAC par l’État), des producteurs de spectacles, des producteurs de disques (labels), des centres de formation ou encore des radios, ainsi que des fédérations et réseaux. Ces entreprises indépendantes et majoritairement associatives ont pour point commun d’œuvrer en faveur de l’intérêt général et de la diversité, notamment en soutenant l’expression des artistes et l’accès à la culture des populations. Le SMA a pour rôle de renseigner et conseiller ses membres en matière juridique, sociale et fiscale. Il les représente aussi dans les instances paritaires professionnelles, telles que le CNM, l’Afdas ou au sein des conventions collectives. Enfin, le SMA défend les intérêts du secteur des musiques actuelles auprès des pouvoirs publics pour une meilleure prise en compte.

À propos de la FÉLIN Depuis sa création en 2009 la FÉLIN (Fédération Nationale des Labels et Distributeurs Indépendants) valorise, représente et accompagne ses adhérents face aux changements profonds de l’industrie musicale. Labels, distributeurs, pôles et réseaux régionaux, en tout ce sont près de 400 acteurs de la création indépendante et garants de la diversité musicale qui sont regroupés au sein de la fédération.

À propos du PROFEDIM Créé en 2003, PROFEDIM (Syndicat Professionnel des Producteurs, Festivals, Ensembles et Diffuseurs Indépendants de Musique) regroupe les structures musicales de toutes esthétiques implantées sur l’ensemble du territoire, qui œuvrent en faveur de l’intérêt général : festivals, ensembles, centres nationaux de création musicale, compagnies lyriques, centres culturels de rencontre, diffuseurs, salles de spectacle, bureaux de productions, académies musicales… Les membres de PROFEDIM, acteurs de la diversité musicale, de l’innovation et de l’indépendance artistique ont en commun de porter des projets musicaux spécialisés en ayant une gestion désintéressée ou une lucrativité limitée.

À propos du CAMULC Organisation patronale représentative des Cabarets, Music-Halls et lieux de Création. Le syndicat a été créé le 13 mai 2016 sous l’impulsion de dirigeants de cabarets et Music Halls situés en régions et à Paris pour répondre au besoin de disposer d’un syndicat représentant spécifiquement les cabarets et Music Halls.